Escarres
LES ESCARRES AU BÉNIN
Dans un hôpital de 250 lits, des petits garçons gisent dans leur lit, paralysés.
Je leur demande ce qui s’est passé, la réponse est toujours la même : « Je
suis tombé d’un arbre... » Ils étaient pâtres, et, pour fournir du fourrage à
leurs chèvres, ils grimpaient chaque jour dans les arbres afin de récolter du
feuillage. Un jour la chute, la fracture de la colonne vertébrale, la paralysie.
L’enfant reste immobilisé dans son lit, une escarre se forme au sacrum, au
bas du dos. Une plaie inguérissable, un trou sale qui se creuse et s’élargit de
jour en jour. L’enfant se tourne alors sur le côté pour soulager la douleur :
très rapidement, une deuxième escarre se forme sur sa hanche. Puis une
troisième sur l’autre hanche...
C’est un médecin péruvien qui a trouvé une solution. Obsédé par le malheur
des pauvres, le docteur José Avendano a, pendant ses trente années
d’exercice en tant que directeur de l’hôpital de Cusco, imposé de soigner
les patients avec des médicaments peu coûteux, des médicaments qu’ils
pourraient continuer à utiliser lorsqu’ils seraient rentrés chez eux. C’est ainsi
que, dans son service, toutes les plaies, toutes les contusions et toutes les
brûlures étaient soignées avec du chou et du miel, à l’exclusion de tout autre
remède. Son protocole, appliqué aux enfants paralysés du Bénin, a fait
merveille. Le chou posé sur les escarres fait sortir pendant les premières
heures des quantités de liquide sale. Puis des bourgeons rouges de chair
neuve apparaissent. Les plaies se referment et cicatrisent si rapidement que
les chirurgiens de l’hôpital béninois en sont frustrés : plus besoin de greffes
de peau sur les petits patients.
Pour ce résultat, les infirmiers de pédiatrie nettoient d’abord l’escarre en
trempant la plaie dans l’eau ou en la tamponnant avec une compresse
imbibée d’eau, sans frotter. Pas d’antiseptique, pas de décapage, car ces
deux manœuvres enlèvent les facteurs de croissance en même temps que
les impuretés. Ils préparent ensuite des feuilles de chou en les roulant sous
une bouteille de verre, faisant remonter le jus de la feuille en surface. Enfin
ils en posent trois épaisseurs, prenant bien soin de ne pas faire déborder les
feuilles hors de la plaie, et couvrent le tout de compresses propres. Le
lendemain, le chou est facile à enlever, et les enfants les bénissent : plus de
douleur lors des pansements, plus de douleur entre les pansements. Les
feuilles sont renouvelées tous les jours en présence de pus, de chairs sales
ou de dépôts blanchâtres, tous les trois jours si la plaie est propre et rouge,
et seulement une fois par semaine en fin de cicatrisation.